jeudi, 17 décembre 2009
Roman
« Un romancier est quelqu'un qui a vu, au moins deux fois, quelque chose qu'il ne devait pas voir, et qui en triomphe. C'est tout. »
Philippe Sollers, Grand beau temps
Audrey Hepburn
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mercredi, 16 décembre 2009
Là où la pensée danse, la musique pense
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samedi, 28 novembre 2009
Un dimanche matin sur France Inter
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mercredi, 25 novembre 2009
sa conception du temps n’est pas la nôtre
"Il y a une guerre incessante : celle qui nous saute à la figure à travers le terrorisme déchaîné par la stratégie directe. Et une guerre plus secrète qui se mène sans cesse, pas seulement économique, et dont les Chinois sont en train de tirer la plupart des fils. Si l’adversaire est unilatéral, je vais faire du multilatéralisme ; comme l’adversaire est capitaliste, je vais devenir encore plus capitaliste. Pratiquer la défensive stratégique, utiliser la force de l’adversaire pour la retourner en ma faveur. Le Chinois s’appuie d’instinct sur la compréhension interne de ce que l’adversaire ose, veut, calcule et est obligé de faire. Il mène une guerre défensive qui peut durer une éternité : sa conception du temps n’est pas la nôtre. Cette guerre peut se prolonger indéfiniment pour user l’adversaire. Elle ne cherche pas l’anéantissement, mais la domination."
Philippe Sollers, Guerres secrètes, Editions Carnets Nord, 2007
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dimanche, 22 novembre 2009
Le Maître est énorme et nu
« Car l’Adversaire est inquiet. Ses réseaux de renseignement sont mauvais, sa police débordée, ses agents corrompus, ses amis peu sûrs, ses espions souvent retournés, ses femmes infidèles, sa toute-puissance ébranlée par la première guérilla venue. Il dépense des sommes considérables en contrôle, parle sans cesse en termes de calendrier ou d’images, achète tout, investit tout, vend tout, perd tout. Le temps lui file entre les doigts, l’espace est pour lui de moins en moins un refuge. Les mots « siècle » ou « millénaire » perdent leur sens dans sa propagande. Il voudrait bien avoir pour lui cinq ou dix ans, l’Adversaire, alors qu’il ne voit pas plus loin que le mois suivant. On pourrait dire ici, comme dans la Chine des Royaumes combattants, que « même les comédiens de Ts’in servent d’observateurs à Houei Ngan ». Le Maître est énorme et nu, sa carapace est sensible au plus petit coup d’épingle, c’est un Goliath à la merci du moindre frondeur, un Cyclope qui ne sait toujours pas qui s’appelle Personne, un Big Brother dont les caméras n’enregistrent que ses propres fantasmes, un Pavlov dont le chien n’obéit qu’une fois sur deux. Il calcule et communique beaucoup pour ne rien dire, l’Adversaire, il tourne en rond, il s’énerve, il ne comprend pas comment le langage a pu le déserter à ce point, il multiplie les informations, oublie ses rêves, fabrique des films barbants à la chaîne, s’endort devant ses films, croit toujours dur comme fer que l’argent, le sexe et la drogue mènent le monde, sent pourtant le sol se dérober sous ses pieds, est pris de vertige, en vient secrètement à préférer mourir. »
Philippe Sollers, Eloge de l’Infini. Janvier 2001
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mercredi, 18 novembre 2009
Les deux !
L’art baroque — peinture et musique — qu’il faudrait d’ailleurs appeler l’art catholique, passe volontiers, on le sait, du sacré au profane sans contradiction : « Le plus souvent, on feint hypocritement de s’étonner d’un paradoxe irritant : Vierge Marie d’un côté ; prolifération voluptueuse de l’autre. Remarque de bon sens, donc de très courte vue. C’est précisément à cause de l’Une qu’on obtient les autres. Titien ou Rubens auraient trouvé dépourvu de sens qu’on leur demande de choisir, de se limiter, de s’en tenir à la Vierge ou à Vénus. Les deux, chers puritains, les deux ! » (Philippe Sollers, Eloge de l’infini).
Photo : Louise Brooks
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mercredi, 04 novembre 2009
Le roman et le temps
"Il n'y a que lui, le roman, pour l'affirmer, le temps, le retourner, le transformer, le retrouver, le faire respirer sous nos yeux comme une peau d'étalon de course, l'isoler, l'écouter, le dilater et le contracter, l'accélérer, le freiner, lui, et le cavalier qui l'écrit, qui le lit ; qui écrit et lit sa propre vie comme elle est vraiment."
Philippe Sollers, Grand beau temps
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vendredi, 30 octobre 2009
Empêchement des affinités électives
"Aujourd’hui, je constate que le programme de la société, qui œuvre à une séparation tyrannique entre les hommes et les femmes pour que chacun reste à sa place, est une forme de censure, d’empêchement des affinités électives."
Lire ici une interview de Philippe Sollers par Vincent Roy, parue dans l'Infini n° 108
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vendredi, 23 octobre 2009
Paradis
Êtes-vous assez joyeux pour le paradis ?
Philippe Sollers, Grand beau temps
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jeudi, 22 octobre 2009
Que veut une femme ?
Pénélope tarde à reconnaître Ulysse, elle ne le reconnaît que dans la façon dont il lui décrit son lit. Cela me permet de dire de Pénélope, retrouvant après vingt ans son Ulysse sur lequel elle a beaucoup pleuré, qu’elle couche à ce moment là davantage avec un lit qu’avec un homme. Il faudrait que tous les maris de la terre, pour autant qu’ils ont noué ce lien toujours teint de sacralité avec une femme, sachent qu’au bout du compte, elles couchent plutôt avec un lit qu’avec un homme.
Pourquoi ? Que veut une femme ? se demandait beaucoup Freud. Homère ; sans effort, nous montre la solution : ce qu’elle veut, en tant qu’elle n’est pas contaminée de divin, c’est un lien, c’est même un lien absolu.
Philippe Sollers, Guerres Secrètes
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mardi, 20 octobre 2009
Le gnostique
Le gnostique cherche une victoire sur la mort à l’intérieur même du temps. C’est exactement ce que je fais, comme Roland Barthes a bien voulu s’en rendre compte dans Sollers écrivain, lorsqu’il évoque ce qui est en jeu dans Drame comme un « éveil » qui serait un « temps complexe, à la fois très long et très court ». « C’est un éveil naissant – dit-il -, un éveil dont la naissance dure. » Le savoir de la résurrection comme seconde naissance se donne et se redonne sans arrêt. Il n’est jamais acquis. On peut le définir très exactement comme une « naissance qui dure ». Le temps qu’on nous inflige n’est pas celui que je dis. Ne croyez pas là une formule, mais la ligne de risque de mon existence. Je n’en ai jamais eu d’autre. Et c’est ce qui, dans mon cas, restera inexpiable pour le Gros Animal qu’est la société.
(Philippe Sollers, LIGNE DE RISQUE, n°24, 2009)
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mercredi, 07 octobre 2009
Plus l'espace est illluminé
"Plus le corps est une limite consciente, plus l'espace est illluminé"
Philippe Sollers, Passion fixe
Hiroshige
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dimanche, 04 octobre 2009
Plus profonds, plus dérapants, plus durs
"Pour moi aussi, c'était le retour, mais les retours ne sont jamais ce qu'on imagine, ils sont chaque fois plus profonds, plus dérapants, plus durs."
Philippe Sollers, Le Secret
Guido Reni, Beatrice Cenci
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mercredi, 23 septembre 2009
Tu te souviendras
"Si tu veux rejouer le COUP FOUDROYANT de Dada, révoque les fantômes à vide de l'avant-gardisme. Ainsi tu ne diras jamais : "Je ne veux pas savoir s'il y a eu des hommes avant moi." Tu te SOUVIENDRAS, au contraire, qu'il y a eu des hommes, et qu'ils ont produit ces gestes, ces phrases, ces oeuvres, que ton cerveau ramène à chaque instant à leur intégrité."
Philippe Sollers
Photo de Richard Avedon
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vendredi, 18 septembre 2009
Toute conversation se réduit désormais...
” Toute conversation se réduit désormais à une succession de monologues alternés où chacun, à toute allure, fait sa propre publicité en face de l’autre. On se tronperait en donnant de ce phénomène criant une interprétation psychologique. Non, votre interlocuteur n’est pas “ narcissique “, ” arriviste “, ” autistique “, voire ” paranoïaque ” : c’est une particule du spectacle, il ne peut pas faire autrement.”
Philippe Sollers, Carnet de nuit
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mardi, 08 septembre 2009
L'espace est fait de points de densité de méditation
Mes seuls témoins aujourd'hui, sont les montagnes, les prés, ce lac, ce rocher, cet océan, ces mouettes. L'espace est fait de points de densité de méditation (là où quelque chose s'est vraiment passé, en réalité des trous dans l'abîme). Le temps se mesure autrement. Il se démesure, plutôt, ni trop tard, ni trop tôt. Il vide.
Philippe Sollers, Grand beau temps, Le Cherche Midi éditions, 2008
Magritte, Le domaine d'Arnheim
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samedi, 04 juillet 2009
L'évangile selon saint Selon
Tchouang-tseu
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dimanche, 21 juin 2009
L'Annonciation, vue par Philippe Sollers
L’Archange Gabriel à la Vierge Marie : « Ecoutez, vous allez concevoir, venant de Dieu, un lapsus mémorable. » - « Quoi ? » - « Pas un organe, un homme. » - « Pas possible ! » - « Vous n’acceptez pas ? » - « Si, si ! » - « Vous serez rétribuée par une superbe Pietà, je discerne dans l’avenir l’artiste qui la sculptera, cadavre exquis de votre fils-dieu-père légèrement allongé sur vos genoux. Juste le temps de poser, hein, vous ne pourrez pas garder le corps, il doit ressusciter et monter au ciel. » - « C’est dur. » - « Sans doute, mais, par la suite, vous monterez vous aussi au ciel avec votre vrai corps d’aujourd’hui. » - « Mon corps ? Mais que voulez-vous que j’en fasse ? Il me déplaît, il me gêne, j’ai encore grossi ces temps-ci. » - « Vous serez réparée là-haut, très belle, éternellement. » - « Hum. » - « Toujours vierge, jeune, belle, blanche, bleue, rayonnante et toujours plus belle, couronnée du soleil, des étoiles, objet d’une adoration perpétuelle, faisant des miracles, apparaissant même de temps en temps aux mortels. » - « Vous allez trop loin. » - « Pas moi, mais Dieu votre père qui a besoin de devenir votre fils pour être pleinement père dans son omnipotence, sa munificence, son insondable présence, son incomparable distance. » - « Bon, mettons. »
Philippe Sollers, Le Secret
L'annonciation Fra Angelico 1433 Retable (détail)
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mercredi, 10 juin 2009
Le temps, lui, ne peut être, à chaque instant, que vertical, étagé, feuilleté, poudroyant, ouvert
« La désorientation est constante, ponctuelle, courbée, systématique, mais n’engendre aucun désordre, au contraire. L’espace est simplement doublé et organisé en reflet, comme un échiquier. Les canaux, les piquets, les ruelles, les quais, les bateaux, les places, les ponts, les puits, le dallage même, orchestrent cette mise en scène géométrique. Le temps, lui, ne peut être, à chaque instant, que vertical, étagé, feuilleté, poudroyant, ouvert. Venise est un entrelacement de chemins qui ne mènent nulle part et qui se suffisent à eux-mêmes ; une horloge où toutes les heures sont égales » Philippe Sollers, Eloge de l’infini
Edouard Manet, Le Grand Canal à Venise, 1874
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samedi, 06 juin 2009
Du coup, une autre vision se dessine
"Il y a les écrits qu’on lit distraitement, ceux qu’on lit en sachant qu’on ne les relira jamais, et puis, en très petit nombre, ceux qu’on relit sans cesse. On les sait presque par cœur, à la virgule près, mais, rien à faire, ils révèlent toujours quelque chose de nouveau, ils sont actifs sans en avoir l’air, ce sont des émetteurs constants, des trésors. Ils font signe. Du coup, une autre vision se dessine."
Philippe Sollers, Les voyageurs du temps, roman
Giovanni Bellini, L'ange musicien
17:43 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : philippe sollers, giovanni bellini